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jeudi 18 juillet 2019

La recherche de lois synthétiques ? Faisons simple, avant de faire compliqué


Pour la physique classique, la première des lois est la proportionnalité, ce qui se fonde sur l'idée de base du calcul différentiel et intégral, lequel repose lui-même sur la continuité des phénomènes. Dans une variation d'un paramètre, si l'on suppose la continuité, un petit intervalle fait apparaître des variations quasi linéaires.
On m'objectera que les fractales montrent que cette idée n'est pas juste, mais je propose que l'on s'intéresse d'abord au gros avant de s'intéresser aux détails. Au premier ordre, la courbe compliquée trouvée par Klaus von Klintzing pour l'effet Hall quantique s'approche d'une droite, celle qui avait été identifiée par Georg Ohm. Au premier ordre, la force est proportionnelle à la masse et à l'accélération. Au premier ordre, le poids est proportionnel à masse. Au premier ordre...
Evidemment on sera bien avisé de dépasser un jour ce premier ordre et de douter de la proportionnalité, mais ce sera un jour seulement, quand le premier ordre aura été fait. Et c'est donc une bonne pratique que de ne pas plonger au deuxième ordre avant d'avoir résolu le premier ordre, de ne pas plonger au troisième ordre avant d'avoir résolu le deuxième, etc.

jeudi 24 janvier 2019

> Bonnes pratiques : à propos des "points aberrants"

En sciences de la nature, il y a la question très compliquée des points aberrants, ce que l'on nomme en anglais des outlyers. De quoi s'agit-il ? Je propose de partir d'un exemple simple, puis de tirer les leçons de l'analyse de ce cas élémentaire.

Un exemple imaginaire

Imaginons le physicien allemand Georg Ohm qui met en série une pile et une résistance électrique.




Il applique une différence de potentiel (une "tension électrique") et mesure l'intensité du courant. Puis il applique une autre différence de potentiel, à l'aide d'une autre pile, et obtient une autre intensité électrique. Et il fait cela pour plusieurs différences de potentiel, mesurant chaque fois l'intensité électrique.
Ayant ces données, il trace un diagramme, où les deux mesures forment les coordonnées de points... et il observe que ces points semblent s'aligner, qu'il y a une proportionnalité entre l'intensité électrique et la différence de potentiel (quand on double la différence de potentiel, on double l'intensité, par exemple).



Jusque là, tout va bien... sauf que les points ne sont pas parfaitement alignés, en réalité. Mais comme les mesures sont (toujours) imprécises, il se dit que la "loi" de proportionnalité est valable, et il la publie.
Oui, mais imaginons qu'il y ait eu une circonstance quelconque qui, pour une mesure, fait une perturbation qui engendre un point de mesure très éloigné des autres. Que faire ?



Évidemment, la première chose à faire est de répéter l'expérience particulière qui étonne, et, alors, deux cas se présentent :
- soit on retrouve la valeur bizarre
- soit on trouve ensuite des valeurs qui correspondent mieux à la loi de proportionnalité qui semble s'imposer expérimentalement.

Le cas le plus simple est celui où l'on retrouve la valeur bizarre. Si cette valeurs apparaît expérimentalement plusieurs fois,  ce n'est pas à nous de dire que l'expérience est mauvaise et que la loi de proportionnalité s'impose; nous devons nous interroger sur la raison de cet écart à la proportionnalité, en imaginant soit que l'expérience particulière que nous avons faite ne permet pas de voir cette proportionnalité, soit que  la nature n'a pas mis là de proportionnalité.
Ainsi, au cours  de mes recherches, je me souviens avoir mesuré la viscosité d'un sirop de sucre à l'aide d'une bille que nous laissions tomber et dont nous mesurions la vitesse. La variation était régulière... mais quand le sirop était très visqueux, le comportement de la bille de venait bien différent de celui décrit par la loi classique, un peu comme pour le point aberrant indiqué ci-dessus. A l'analyse, il était facile de voir, pour ce cas très simple, que le récipient, étroit, ne permettait pas aux écoulements de se faire librement, ce qui modifiait le résultat.

Les valeurs bizarres sont en réalité très intéressantes, car il y a cet adage qui stipule que lorsqu'on fait une expérience et que l'on obtient le résultat qu'on attendait, on a une confirmation,  mais si l'on a un résultat que l'on n'attendait pas, alors on a peut-être une découverte.  

Considérons maintenant le cas où, répétant l'expérience, au moins celle particulière qui a fait apparaître le point aberrant,  on trouve une valeur qui correspond mieux à la loi de proportionnalité. Là, c'est ennuyeux, car on est en réalité face à deux valeurs tout aussi probables (même s'il y a cette présomption de proportionnalité qui semble donner plus de poids à une valeur bien alignée), de sorte que l'on doit faire une autre répétition.
Ici, il faut quand même que j'observe, pour ceux qui l'ignorent, que l'expérience décrite pour la mesure de l'intensité et du potentiel électrique se fait en quelques instants, mais que, souvent, la répétition d'une expérience ne se fait pas en un claquement de doigts : certaines expériences prennent des mois, voire des années, de sorte qu'il est essentiel de bien choisir la stratégie que l'on utilise. Pour des expériences comme la détection du boson de Higgs ou des ondes gravitationnelles,  il hors de question de décider légèrement de répéter une expérience, et l'on doit avoir une stratégie très intelligente -dans le cadre des bonnes pratiques-,  c'est-à-dire de ne pas céder à ses croyances ou à ses fantasmes. Admettons ainsi que deux mesures semblent correspondre, alors qu'une troisième valeur est bizarre ; il y a lieu de mettre en œuvre des statistiques et d'afficher des résultats avec des probabilités, pas plus
Et l'on retrouve ici cette idée que la science n'est pas en train de démontrer des théories, mais plutôt de les réfuter :  les valeurs bizarre que l'on ne retiendra pas doivent être conservées, et elles doivent notamment être signalées lors de la publication d'un résultat.


Un exemple

A titre d'exemple, le cas le pire  que nous ayons rencontré dans notre groupe était à propos de la dégradation d'un composé, dans des conditions particulières très rigoureusement définies :  nous utilisions des matériels très propres, des produits très purs, des conditions très exactement contrôlées. Lors d'une première expérience (3 semaines de travail), nous avons mesuré la vitesse de dégradation du composé. Puis, quand nous avons répété l'expérience (nous répétons toutes nos expériences au moins trois fois), nous avons obtenu une dégradation beaucoup plus lente.
Évidemment la première chose à faire était de répéter encore l'expérience et nous avons retrouvé la dégradation plus lente. Je répète que ce qui se dit ici en quelques mots correspond à des semaines de travail... pour donner à évaluer le sentiments des chercheurs face à ces points aberrants, que seuls les malhonnêtes occultent (la poussière sous le tapis).  Bref, nous n'avons jamais réussi à retrouver la première vitesse de dégradation, qui semble donc être aberrante, mais que faire, devant une telle situation ? On se doute que nous avons tout analysé en détail : repris les cahiers de laboratoire pour voir comment les choses avaient été faites, par exemple... mais rien. 

Dans un tel cas, la bonne pratique s'impose : valider les mesures ultérieures par une autre expérience, différente, ce qui correspond à des "validations". Mais, aussi, lors d'une publication du résultat, évoquer ce premier résultat qui peut découler de causes innombrables : n'a-t-on pas vu, au centre de recherches d'études des particules de Genève, une oscillation d'un signal électrique due au passage du TGV près de l'anneau de collision ?

mardi 3 novembre 2015

Ecrivons à nos élus

Si l'organisation de notre société ne nous convient pas, nous avons le devoir de le faire savoir et, dans une démocratie, les représentants des citoyens sont là pour mener la discussion et arriver à un consensus national.
 Il est bon de se souvenir que les députés sont nos élus,  qui nous représentent pour ce qui concerne les lois nationales.
Il y a aussi d'autres élus, par exemple  les maires, les sénateurs, etc. mais si les maires sont les organisateur et les gestionnaires des communes,  ils ne sont pas là pour déterminer les lois et ce sont plutôt les députés qui sont chargés de ce travail. Ne confondons pas les rôles.
Je me demande s'il n'y a pas quelque indécence à "vitupérer dans les bistrots", au lieu de faire d'abord remonter vers les élus en charge des récriminations qui sont alors à la fois inutiles, et malavisées ? D'ailleurs, il est étonnant de voir que les députés sont saisis de bien peu de demandes, alors que fait leur travail d'élus est précisément de bien entendre tout ce que les citoyens veulent dire.
Ne pourrions-nous pas, même, considérer qu'il n'est guère civique de ne pas solliciter nos députés ?  Allons, écrivons leur chaque fois que l'organisation de nos sociétés n'est pas telle que nous la voudrions  : c'est un devoir civique !

lundi 29 juillet 2013

Lundi 29 juillet 2013. Des questions. Comment perfectionner la vulgarisation scientifique ?


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Pour expliquer pourquoi la vulgarisation scientifique (certains disent « médiation », mais, après plusieurs décennies d'exercice, je crois que la différence est sans intérêt), prenons deux exemples : la loi d'Ohm et l'effet photoélectrique.

Au XIXe siècle, le physicien allemand Georg Simon Ohm mesure des différences de potentiel (pensons à une chute d'eau) associées à des intensités de courant (pensons au débit), en faisant passer divers courants électrique dans un même conducteur (pensons à une tige métallique), et il découvre que le rapport, le quotient, de la différence de potentiel par l'intensité du courant est constant, pour un même conducteur : il nomme « résistance électrique » de ce conducteur particulier le quotient obtenu.
Jusque là, la vulgarisation-récit se tient. Pour expliquer la découverte (croyez-moi, je peux faire mieux que cela, mais l'objectif, ici, n'est pas d'expliquer la loi d'Ohm), il a suffi d'imposer aux interlocuteurs une simple division.
Pourquoi la loi d'Ohm s'observe-t-elle, quand on dispose d'outils scientifiques du XIXe siècle ? En soi, une loi est sans intérêt autre que technique, mais, pour parler de science, il faut poursuivre l'explication, chercher les mécanismes qui sont derrière la loi, et, en l'occurrence, discuter la notion d'électrons et leur propagation dans les conducteurs.
Présenter des électrons ? On pourra encore recourir à une expérience : celle d'un tube de Crookes, par exemple, un tube où l'on fait le vide et où l'on applique une différence de potentiel électrique (on branche une pile, en pratique) entre deux électrodes, placées aux extrémités du tube. Encore un récit. Et pour décrire le propagation des électrons dans un conducteur ?O n pourra sans doute, à nouveau, se limiter à une description en mots.
D'ailleurs, le physicien Stephen Hawkings, qui publia un livre de vulgarisation pas extraordinaire, mais qui eut du succès, y explique que son éditeur lui avait dit d'éviter les équations, sous peine que le livre ne se vende pas. Voilà donc l'état de la vulgarisation scientifique, en ce début du XXIe siècle. Des récits, des récits que l'on est invité à croire, sans pouvoir juger. Bref, la vulgarisation scientifique est une information par croyance, alors que les Lumières auraient préféré, n'est-ce pas, qu'elle sollicite la Raison !
Oui, au fond, qui nous prouve que ces récits sont exacts ? Que ce ne sont pas de fantasmagoriques élucubrations, comme le sont les récits des pseudo-sciences ? Les sciences quantitatives ont cela de merveilleux que ce sont pas des récits au hasard, que ce ne sont pas des divagations : parmi l'ensemble des possibilités de mécanismes, c'est l'adéquation des mesures à la théorie qui conduit à la sélection d'un ou de plusieurs mécanismes admissibles.

Passons au second exemple : l'effet photoélectrique, étudié par Albert Einstein, en 1905. Cette fois, le récit consiste à expliquer que l'on place deux plaques métalliques en vis-à-vis, à l'intérieur d'un tube en verre où l'on a fait le vide, et l'on applique une différence de potentiel modérée entre les deux plaques. Rien ne se passe.
Puis on éclaire une des plaques, à l'aide d'une lumière de longueur particulière, par exemple du rouge. Rien ne se passe. On augmente l'intensité de la lumière, ce qui correspond à une énergie de plus en plus grande, et rien ne se passe.
On change alors la longueur d'onde de la lumière, passant du rouge au bleu, par exemple, et, soudain, pour une longueur de particulière, un courant électrique se met à passer entre les plaques.
Jusque là, on a expliqué le phénomène par un recours à l'expérience ; on a décrit le phénomène, par un récit, mais comment expliquer le phénomène ?
Cette fois, le recours à une simple division ne suffit plus. Pour autant, le calcul, dans ce cas, n'est pas difficile ; il est à la portée d'un étudiant de baccalauréat. Mais c'est le calcul qui dit tout !
Bien sûr, on aurait pu « expliquer » que la lumière est faite de « grains » nommés photons, chacun porteur d'une énergie particulière, mais comment expliquer l'effet photoélectrique ? Seul le calcul en donne une explication, et ce n'est pas la transcription du calcul avec des mots du langage naturel qui aide à comprendre. Au contraire même : les phrases deviennent très longues, les notions s'enchaînent les unes aux autres, et l'on découvre à cette occasion que le calcul formel, où des notions comme l'énergie, la masse... sont remplacés par les lettres E, m..., est bien plus efficace pour la compréhension que la description avec des mots.
La description avec des mots ne donne pas de compréhension des phénomènes, et seul le calcul - très simple- permet de comprendre combien le travail d'Einstein, dans ces circonstances, était merveilleux.
Et puis, il y la question de la sélection d'un récit parmi d'autres, qui doit être considérée. Pour expliquer un phénomènes, on peut invoquer mille mécanismes, mais les sciences quantitatives, je l'ai déjà écrit dans d'autres billets, ont cette particularité que le calcul permet de faire la sélection. Le recours aux nombres, aux notions formelles du calcul, la considération que le monde est écrit en langage mathématique... C'est cela, la science, et non un récit qui s'apparente... ôsons le mot, à celui des religions. Il ne s'agit pas de foi, mais d'émerveillement de voir le monde fonctionner selon des lois formelles toujours insuffisantes, certes, mais de plus en plus précisément collées aux phénomènes.

De ce fait, je crois que la vraie tâche de la vulgarisation, c'est donc d'expliquer les calculs, et de ne pas se limiter à des récits. C'est une tâche difficile, merveilleuse, qui nécessite des talents nouveaux, des énergies puissantes, des esprits tout tendus vers cet objctif remarquable.
La vulgarisation scientifique évoluera-t-elle, au XXIe siècle, de façon qu'elle devienne enfin capable de considérer la vraie activité scientifique ?